Il est longtemps resté placardisé. Alors pour lui faire une place dans nos imaginaires, des créatrices déclinent le clitoris sous toutes ses formes, en bijoux, porte-clefs et même en version doudou. Quatre d'entre elles ont expliqué leur démarche à Zézette. De quoi vous inspirer des cadeaux qui sortent de l'ordinaire à l'approche de Noël.
Laurène Robin, fondatrice de Polymelau entourée par ses porte-clefs clitoris / © Polymelau
Quel a été le déclic qui vous a poussée à vous pencher sur le clitoris en tant que créatrice de bijoux ?
Laurène Robin : Ce qui m’a poussée à détourner le clitoris en objet, et donc en porte-clefs, c’est qu’il est en permanence invisibilisé, très régulièrement nié, peu souvent expliqué. Je dirais également que c’est aussi l’expression d’un “nous aussi on est là” en opposition à la prédominance du sexe masculin dans notre société.
Avant ces porte-clefs, quel était l'univers de Polymelau ?
Polymelau n’existait pas ! C’est parti de la simple envie d’offrir un porte-clefs clitoris à l’une de mes sœurs. Pourquoi un clitoris me direz-vous ? Sur le moment, je trouvais ça drôle. On se fait pas mal de blagues avec mes sœurs et on cherche toujours des cadeaux originaux à s’offrir. On est une famille de femmes aventureuses et indépendantes essayant tant bien que mal de se défaire d’un conformisme que la société tend à nous inculquer. On tente de le faire sans se prendre trop au sérieux, avec toujours une touche d’humour
Avez-vous déjà décliné le clitoris sous d’autres formes que le porte-clefs ?
Il m’est déjà arrivé de le décliner en boucles d’oreilles et en colliers. J’aime aussi tout ce qui peut s’aimanter sur le frigo. Je suis en train de voir pour développer des magnets clitoris dans une autre forme que celle pensée pour les porte-clefs. Au départ, je voulais quelque chose de discret et en même temps d’utile. Durant ma phase d’exploration, je m’étais questionnée sur le fait de les faire en boucles d’oreilles. Mais je n’étais pas satisfaite de l’esthétisme. J’ai donc vite laissé cette idée de côté, bien que j’ai pu en réaliser sur demande pour des clients. L’autre point important était également de proposer un objet accessible à tous.tes, tant en termes de prix que dans la façon de s’exposer avec. Un porte-clefs, on l’utilise tous les jours, il fait partie de notre quotidien mais cela reste discret. Peut-être que les premiers temps on guette les regards puis on finit par ne plus y faire attention, à tel point que lorsque l’on va chez le garagiste, on le tend comme si de rien n’était. Ce n’est qu’ensuite que l’on repense au sourire interrogateur qu’il a pu susciter. L’idée est de banaliser cet organe tabou et invisibilisé. C’est une manière de créer l’échange et le questionnement.
Vos clitoris libèrent-ils la parole ?
En tous cas je ne force personne à m’en parler. C’est tout l'intérêt de ma démarche : offrir une porte d’entrée sur ce sujet sans venir forcer ou choquer les personnes que j’ai en face de moi. Je trouve que les couleurs permettent d’adoucir le sujet. Et vu que je propose d’autres créations, certaines personnes vont commencer par me questionner sur un autre produit avant de dériver sur le porte-clefs. Il arrive parfois qu’on ne reconnaisse pas ce que c’est. Il n’y a alors aucun jugement de ma part. Je me permets d’expliquer si je vois la personne prête à écouter.
Quel message cherchez-vous à faire passer ?
Que ce soit les clitoris comme mes autres créations, le message que je cherche à faire passer est d’oser, de croire en soi et d’affirmer ses valeurs, que cela soit haut et fort ou au contraire de manière discrète, selon la personne que l’on est.
Y a-t-il d'autres thèmes liés à l'intimité que vous aimeriez aborder ?
Il y a peu je me suis lancée dans la création de boucles d’oreilles vulve qui reprennent l’effet vague des lèvres. J’ai aussi travaillé autour des poitrines. Dans un premier temps dans des teintes de peau, puis dans la couleur car c’est plus fort que moi.
Quelle est la question ou la remarque la plus inattendue que l'on vous ait faite à propos de vos bijoux clitoris ?
Ce n’est certainement pas la plus inattendue mais elle vient de personnes qui n’ont pas forcément compris la visée du message et qui me demandent “où sont les porte-clefs pénis?” Je ne leur en veux pas, mais c’est vrai que le message a besoin d’être explicité dans ces cas-là.
Infos pratiques : les créations de Polymelau sont à retrouver sur Instagram et sur alchimies-shop.com
Les créations clitoridiennes d'Atelier Grenade / © Atelier Grenade
Quelle était votre ambition en lançant votre marque de bijoux ?
Caroline Sabotinov-Tuernal : Atelier Grenade est né de deux élans qui se sont rencontrés : mon amour absolu pour les belles choses et mon besoin tout aussi profond d’affirmer qui je suis et ce en quoi je crois. Je voulais créer des accessoires qui racontent mon identité queer, mais sans jamais tomber dans la gravité ou le didactique. Je voulais du fun, de la couleur, du décalage, du rire, tout ce que la culture camp fait de mieux depuis toujours.
Quelles sont vos sources d'inspiration ?
Je m’inspire de la pop culture et bien sûr plus particulièrement de la pop culture queer. Les questions de société sont bien sûr aussi une source d’inspiration. Je reprends notamment les slogans des manifestations. Mes bijoux, c’est ce mélange : du queer, du camp, du politique et beaucoup de joie.
Pourquoi avoir choisi de représenter le clitoris sous forme de broche ?
Le clitoris est l’un des organes les plus cachés de notre histoire collective. Sa représentation complète est extrêmement récente et son invisibilisation en dit long sur la place accordée au plaisir féminin. En le transformant en broche, j’avais envie d’inverser le scénario : prendre un symbole longtemps effacé et le rendre visible, assumé. La broche est un bijou délicat, associé à la discrétion. C’est précisément ce contraste qui m’intéressait. Porter un clitoris au revers d’une veste, c’est à la fois doux, beau et profondément politique. La pièce devient alors un clin d’œil féministe autant qu’un accessoire.
Au-delà du clitoris, comment explorez-vous l'intimité ?
Je ne parle jamais de sexualité de manière littérale. Ce qui m’intéresse, ce sont les symboles, les codes culturels et les représentations, pas l’intime en tant que tel. Les emojis de mes chaussettes par exemple — aubergines, pêches, gouttes — incarnent un langage pop autour du désir. Je les utilise comme un miroir de notre époque. Je crée des bijoux qui parlent du regard social, pas de ce qui se passe dans la chambre à coucher.
Comment réussissez-vous à marier l'esthétique du bijou avec la dimension crue ou parfois taboue des sujets que vous abordez ?
Pour moi, il n’y a aucune contradiction. Le clitoris, quand on le représente dans son entièreté, a une forme incroyablement poétique. On me dit souvent qu’il ressemble à une fleur, à une queue de sirène, voire à un cœur à l’envers. C’est un organe magnifique. Sa beauté n’est pas un embellissement, elle est déjà là. Et puis, dès qu’on y ajoute des couleurs, des paillettes, de la brillance, tout devient encore plus évident. On n’est pas dans le cru mais dans le symbole, dans le graphique, dans quelque chose qui célèbre.
Comment avez-vous procédé pour représenter le clitoris ?
Je me suis basée sur des schémas scientifiques et des représentations anatomiques complètes du clitoris. Une fois cette base posée, je l’ai stylisée pour en faire un bijou. J’ai simplifié les lignes, accentué certaines courbes… L’objectif n’était pas la reproduction médicale mais une forme fidèle, lisible et surtout esthétique qui puisse devenir un symbole à porter.
Quel pourrait-être le slogan de la broche clitoris ?
Sans hésiter : « moins de fachos, plus de clitos ». C’est un slogan que je décline en porte-clefs mais qui est surtout affiché au-dessus de la porte de la boutique.
Comment vos créations participent-elles à la déconstruction des normes de genre binaires ?
Je ne prétends pas révolutionner la société, loin de là. Mais je crois que mes créations offrent de petits espaces de respiration, des symboles qui sortent du cadre binaire. En jouant avec les codes queer, en détournant les clichés, en rendant visible ce qui a longtemps été caché, mes bijoux participent à leur manière à fissurer les silences. Ce sont des petits objets mais qui clament fort des messages importants.
Avez-vous le sentiment que vos bijoux ouvrent des conversations ?
Oui, clairement. Beaucoup de personnes reviennent me voir pour me raconter que leur broche ou leurs boucles d’oreilles clitoris ont déclenché des conversations inattendues, parfois avec des gens avec qui elles n’auraient jamais abordé ces sujets. C’est souvent raconté avec humour, mais derrière il y a quelque chose de très touchant. Mes pièces deviennent des prétextes pour parler de corps, de plaisir, de représentations… Je crois que c’est là que le bijou joue son rôle. Il ouvre des portes que les mots n’osent pas toujours ouvrir.
En quoi un bijou peut-il être un outil d'émancipation pour ceux et celles qui le portent ?
Un bijou, c’est une façon d’affirmer qui l’on est sans avoir à se justifier. Porter une pièce Atelier Grenade, c’est pouvoir dire son identité, sa queerness, ses convictions dans l’espace public, parfois même avant d’avoir prononcé un mot.
Quels sont les thèmes liés à la sexualité que vous aimeriez explorer dans de futures collections ?
J’aimerais explorer davantage les questions de transidentité. En tant que personne cis, j’avais peur d’être maladroite ou de m’approprier des sujets qui ne sont pas les miens. Mais plusieurs personnes trans m’ont confié que mes créations leur faisaient du bien, qu’elles se sentaient vues, et elles m’ont encouragée à créer encore plus de modèles qui parlent de ces identités. Leur retour m’a rassurée et encouragée. J’ai envie d’aller dans cette direction, de créer des pièces qui célèbrent toutes les identités, les parcours et la fierté.
Au-delà de la création, voyez-vous Atelier Grenade évoluer vers d'autres formes d'engagement ?
Atelier Grenade est déjà engagé au-delà de la création. Je collabore avec des associations comme l’AHCAMA et l’ACPPT qui luttent contre les mutilations génitales féminines, ou encore SOS Homophobie. Ces partenariats me tiennent vraiment à cœur parce qu’ils donnent un sens concret à mon travail. J’aimerais continuer dans ce sens : soutenir des projets, créer des pièces dédiées ou participer à des actions de sensibilisation quand c’est pertinent. Pour moi, la création et l’engagement vont naturellement ensemble.
Quel changement souhaiteriez-vous voir se concrétiser dans la manière dont notre société aborde la sexualité et le genre, et comment Atelier Grenade peut-il y contribuer ?
J’aimerais que la société aborde la sexualité et le genre avec plus de connaissances, plus de nuances et surtout beaucoup moins de honte. Qu’on arrête d’invisibiliser certains corps ou certaines identités, et qu’on cesse de faire comme si parler de plaisir, de transition ou de diversité était un sujet explosif. Je ne prétends pas changer le monde mais, modestement, rendre ces conversations plus légères, plus normales, plus joyeuses. Si mes créations peuvent apporter un peu de douceur, de fierté, de liberté et de militantisme joyeux dans un monde parfois très crispé, ce serait déjà beaucoup.
Infos pratiques : plus d’infos sur ateliergrenade.com et sur Instagram
Lucie de Boer, joaillière et fondatrice de Lucie & the Clit / © Lucie & the Clit
Avec "Lucie & the clit", vous avez choisi un nom particulièrement percutant…
Lucie de Boer : Je voulais quelque chose de simple et efficace, qui annonce clairement la couleur. Ce nom m’est venu sans prise de tête. Il m’est apparu évident parce qu’il est à la fois explicite, un peu drôle et même légèrement teinté d’une vibe rock !
Quel a été le moment clef où vous vous êtes dit : "Je vais créer des bijoux en forme de clitoris" ? Était-ce une démarche artistique, militante ou une combinaison des deux ?
L’idée m’est venue pendant ma formation en bijouterie, il y a une dizaine d’années. On était entre potes, autour d’une bière dans un bar, quand la discussion a dérivé sur le clitoris. Quelqu’un a alors demandé : “Est-ce que vous savez à quoi ressemble le clitoris ?” Évidemment, on a tous rigolé en répondant : “Ben oui, c’est un petit point, là, en bas !” Jusqu’à ce que cette personne nous montre une image 3D du clitoris. Et là, surprise générale : personne ne connaissait sa vraie forme, pas même moi ! C’est à cet instant que la graine a été plantée. La forme était si belle, et pourtant totalement méconnue... Il fallait en faire quelque chose. Cet organe fabuleux si longtemps invisibilisé méritait de sortir de l’ombre, et je pouvais le faire à travers mon art qui est la bijouterie. Colliers, boucles d’oreilles, bagues... sont des pièces à porter fièrement comme un blaze !
Quels types de bijoux proposez-vous dans votre collection "clit" ? Y a-t-il une pièce qui est devenue l'emblème de la marque ?
Je propose des bagues, des boucles d’oreilles et des colliers. Trois designs de base sont disponibles sur mon site — The One Clit, les Clitearrings et la Clito Ring — mais je crée aussi beaucoup de pièces uniques et d’autres variations autour du clitoris que je présente sur les marchés ou dans les boutiques qui distribuent mes bijoux. Pour moi, la pièce emblématique de la marque reste le collier The One Clit. C’est par lui que tout a commencé, et c’est encore aujourd’hui mon best-seller.
Vous parlez de "bijoux qui sortent du commun". Comment travaillez-vous l'esthétique pour que ces représentations du clitoris soient à la fois reconnaissables et désirables comme objets de parure ?
Je pense que mes bijoux sortent de l’ordinaire parce qu’on n’en voit pas partout et qu’ils représentent quelque chose de fort, avec une signification différente pour chaque personne qui les porte. J’ai voulu conserver la forme du clitoris tout en la stylisant dans un design qui me plaisait vraiment. Leur petite taille les rend, à mes yeux, extrêmement choux tout en restant subtilement audacieux. Je tenais aussi à créer des bijoux que l’on puisse porter au quotidien, simples à assumer, mais qui racontent quelque chose et portent une vraie intention.
L'humour et le décalage permettent-il de dédramatiser le sujet de la sexualité ?
Tout à fait ! Créer des bijoux en forme de clitoris, c’est quelque chose qui me représente vraiment. J’ai toujours eu tendance à sortir de l’ordinaire avec des idées un peu farfelues, et c’est une excellente manière de se démarquer. Cela génère toujours des discussions rigolotes et contribue à dédramatiser un sujet qui reste trop souvent tabou.
Collier et pendentif The one Clit / © Lucie & the Clit
Quel est le message que vous souhaitez faire passer en faisant du clitoris un bijou ?
Au tout début, je n’avais pas forcément de message précis en tête. Ce qui m’a guidé, c’est la surprise de découvrir si tardivement la véritable forme du clitoris. Cela m’a confortée dans l’idée que mes créations pouvaient être non seulement décoratives mais aussi porteuses de sens et réellement impactantes.
En quoi un bijou en forme de clitoris peut-il servir d‘outil d'émancipation pour la personne qui le porte ?
Au fil des discussions avec ma clientèle, j’ai compris que chacun avait ses propres raisons de porter un bijou clit : confiance en soi, militantisme ou simplement amour du clitoris. Il n’y a pas un message unique derrière ces pièces mais une multitude d’histoires personnelles.
Quelles sont les réactions du public ?
Les réactions sont toujours très positives. Les gens trouvent l’idée excellente et la réalisation soignée, ce qui fait toujours plaisir lorsque l’on aime autant ce que l’on crée. J’ai deux anecdotes qui me viennent en tête. La première, lors de mon tout premier marché, deux jeunes femmes sont passées à mon stand et je les ai accueillies comme toujours : “Bonjour ! Bienvenues dans le monde du clitoris !” Quand j’ai expliqué la forme de mes bijoux, l’une d’elles a détourné le regard ultra gênée en disant : “Oh là là non ! Ce n’est pas pour moi !” Elles sont reparties et je n’ai pas insisté. La deuxième est plus touchante. Une cliente souhaitait se réapproprier son corps après plusieurs blessures, notamment au niveau intime. Elle a perçu le collier clit comme un symbole fort de confiance en soi, l’aidant à se réapproprier son corps. Elle en était toute émue.
Comment percevez-vous le rôle de votre marque dans le mouvement de déstigmatisation et de reconnaissance du plaisir féminin ?
Je ressens une vraie fierté de faire partie de ce mouvement et de cette communauté. Pouvoir transmettre un message à travers mon art, toucher un public qui aime porter de beaux bijoux tout en affichant des valeurs, c’est très gratifiant.
Y a-t-il d'autres facettes de la sexualité ou de l'intimité féminine que vous aimeriez explorer ?
Tout ce qui touche aux femmes m’intéresse profondément. Cette sororité peut être si puissante ! J’ai par exemple réalisé des boucles d’oreilles en forme de seins pour Octobre Rose afin de collecter des fonds pour une association pour la lutte contre le cancer du sein. Pour le moment, je n’ai pas d’autre projet précis, mais la porte reste ouverte et les idées peuvent fuser à tout moment !
Quels sont vos prochains projets ?
J’avais envisagé un temps de créer des sextoys de luxe. C’est original et farfelu, et je suis certaine qu’on pourrait faire des choses incroyables. Mais cela demande beaucoup de temps de travail et de réflexion que je n’ai pas forcément pour le moment. Un jour peut-être ! Sinon, je souhaite développer mon site en ajoutant plus d’articles et proposer mes bijoux dans davantage de boutiques, en Suisse et à l’étranger.
Infos pratiques : plus d’infos sur lucieandtheclit.ch et sur Instagram
Le clitoris peluche fabriqué par Crochet by Juliette / © Crochet by Juliette
Comment est née l'idée de crocheter des peluches et des porte-clefs en forme de clitoris
Juliette Beauducel : Lorsque j’ai crocheté un clitoris pour la première fois, je n’avais pas encore ouvert mon entreprise. J’étais déjà impliquée dans la cause féministe et le sujet des tabous autour de la sexualité féminine me tenait à coeur. J’ai donc eu l’idée de me crocheter un porte-clefs clitoris. C’est après avoir ouvert mon entreprise que je me suis dit que ce serait une bonne idée de les proposer à la vente.
Quel message souhaitez-vous faire passer à travers vos créations ?
Je souhaite sensibiliser à la nécessité de mieux connaître son anatomie. Pendant très longtemps, le clitoris a été exclu des programmes scolaires, ne figurant même pas sur les schémas de vulves. Énormément de femmes ne savent même pas qu’elles possèdent un clitoris, ou bien n’en connaissent pas la forme ni la taille.
Pourquoi avoir choisi le crochet pour représenter un sujet encore souvent tabou ?
Au moment où j’ai commencé à réaliser des clitoris au crochet, je venais de commencer à apprendre le crochet. C’est à ce moment-là que je me suis dit que je pourrais utiliser cette technique pour faire un clitoris.
Avez-vous craint les réactions ?
Je n’ai absolument pas peur du jugement. Dans le commerce on retrouve très souvent des objets de formes phalliques. Il n’y a pas de raisons que l’anatomie féminine soit plus taboue que l’anatomie masculine.
Quelles ont été les réactions les plus marquantes que vous avez reçues depuis le lancement de ces clitoris ?
Au départ je n’avais pas fait de catégories spécifiques sur mon site Internet pour les clitoris en crochet. Plusieurs personnes m’ont fait remarquer que c’était « dérangeant » de voir une peluche en forme de clitoris au milieu de mes autres peluches aux formes beaucoup plus classiques. J’ai donc fini par faire une catégorie spécifique afin que les personnes qui tombent sur ces créations l’aient fait par choix.
Vos clitoris ont-ils trouvé leur public ?
Je n’en ai pour l’instant vendu qu’un seul !
Quels formats proposez-vous ?
Je propose deux types de formats : un format peluche en polyester, ce qui garantit la douceur, et un format porte-clefs en coton. Ils sont rembourrés avec de la ouate de polyester recyclée.
Infos pratiques : plus d’info sur crochetbyjuliette.fr et sur Instagram
Propos recueillis par Julien Claudé-Pénégry
Dans Rio ne répond plus en 2009, Jean Dujardin, dont le personnage s’appelle Noël Flantier, a cette réplique devenue culte sur les “boules de Noël”. Des boules de Noël que vous avez matérialisées en 2023. Pourquoi ?
Stanislas Cornier : Je suis artiste plasticien et j’en avais marre de ces concours de kékette et de l’univers hyper macho dans lequel on vit encore. Alors plutôt que de poser ses couilles sur la table, je me suis dit qu’on pouvait aussi les suspendre au sapin.
Pour dégonfler l’ego de nos couilles en quelque sorte…
Oui. Et cela a tout de suite très bien marché. Les gens étaient très amusés. J’ai reçu des commandes de partout en France, mais aussi de Suisse et de Belgique. Et il n’est pas rare que l’on m’envoie des photos des boules une fois qu’elles ont trouvé leur place dans le sapin.
Les boules de Noël de l'artiste plasticien Stanislas Cornier / © Stanislas Cornier
C’est une autre façon de voir les testicules…
Il s’agit de s’amuser des stéréotypes virilistes pour changer le regard que l’on porte sur le masculin. De manière générale, ce qui m’intéresse dans mon travail c’est de proposer d’autres grilles de lecture, pas juste dénoncer. Par exemple, j’ai créé des crapauds et des grenouilles pour dire que nous avions tous des endroits en nous que l’on n’aime pas trop. J’y ai ajouté des petits miroirs en dessous. Une fois qu’on les a embrassés, on les retourne pour voir si l’on s’est transformé en prince ou en princesse. Certains matins oui, d’autres non... Ce sont de petits rituels qui ne vont pas changer le monde, juste quelques petites fractions de seconde dans notre journée. L’un de mes adages préférés c’est “S’aimer bien pour semer juste”. Si l’on s’aime bien tel que l’on est, alors on a moins de problèmes lorsqu’il s’agit d’aller vers les autres. On prend les choses avec plus de distance et plus de souplesse. Et l’humour aide beaucoup…
Infos pratiques : les “boules de Noël” sont à commander en contactant Stanislas Cornier via Instagram ou au 06 38 74 02 97
Propos recueillis par Blanche Garofalo
Tout simplement (attention scoop…) parce qu’en 2025, il n’existe toujours pas de média consacré à la sexualité et à l’amour, et ce bien qu’ils fassent partie des rares sujets qui nous concerne tous à travers le monde. On trouve pourtant des journaux sur à peu près tout. Les camping-caristes ont ainsi leur magazine, Camping-car Magazine, depuis 1978, et les mostrophilistes (c’est comme cela que se font appeler les collectionneurs de montres) peuvent feuilleter Montres magazine depuis près de 30 ans.
Si la sexualité s’est fait une place dans les médias ces dernières années et que des voix de plus en en plus nombreuses se font entendre, la sexualité reste désespérément vierge de toute publication (en dehors des seules revues médicales qui lui sont consacrées...).
Puisque, dixit Oscar Wilde, « tout dans le monde est une question de sexe, sauf le sexe qui est une question de pouvoir », l'enjeu est de parvenir à parler sexualité sans honte comme de n’importe quel autre sujet. Car il s’agit bien d’explorer toutes ses facettes, notamment pour décortiquer les rapports de domination entre hommes et femmes.
Quant à l’amour, s’il fait les beaux jours de la littérature ou du cinéma, il a encore du mal à être pris au sérieux, ce dont témoigne la neuroscientifique Stéphanie Cacioppo dans son livre Le pouvoir de l’amourqui a dû braver le scepticisme lorsqu’elle a entamé ses recherches sur le sujet.
Telles sont les raisons d'être de Zézette, premier média indépendant 100 % dédié à la sexualité et à l’amour avec pour but d’en faire des sujets de conversation que l’on ne se sent plus gêné d’aborder par crainte de la honte ou d’une supposée mièvrerie. Le principe : une newsletter envoyée au moins deux dimanches par mois, et plus si affinités…
Pour suivre Zézette sur Instagram, c’est ici